Comment le changement climatique menace l’agriculture ?
09/12/2024 - Même les plus sceptiques en conviennent : le changement climatique est désormais flagrant. Et les menaces qu’il fait peser sur l’agriculture chaque jour un peu plus visibles. Mais quelles sont concrètement les conséquences de l’évolution du climat pour le monde agricole et surtout, comment tenter d’y faire face ?
Quand les bouleversements climatiques mettent en péril les récoltes
La récurrence des périodes de sécheresse, un danger imminent pour l’agriculture
Conséquence du changement climatique, l’augmentation de la fréquence des périodes de sécheresse impacte directement la production agricole.
Le sujet est d’autant plus préoccupant que ces périodes sans eau tendent à se prolonger. Le stress hydrique est alors intense et très destructeur pour les cultures. Facteur aggravant, les terres régulièrement soumises à la sécheresse perdent en fertilité à long terme. Pour les agriculteurs, c’est la double peine.
Des cycles de pluie toujours plus erratiques
En France, où que l’on regarde, les terrains agricoles portent les stigmates du changement climatique.
Après deux saisons de sécheresse, ce sont désormais des épisodes prolongés qui bouleversent les travaux des champs.
L’irrégularité des précipitations… Plus encore que le manque d’eau, c’est sans doute là le problème majeur des agriculteurs. Une valse-hésitation qui complique la gestion des cultures et perturbe les calendriers. Soumis aux aléas de la météo, les semis, la taille, l’épandage et bien sûr les récoltes se trouvent décalés. Au bout du compte : des rendements en baisse, des productions de moins bonne qualité et des pertes de revenus pour les exploitants.
Pour couronner le tout, la pluie tend souvent à s’abattre sous forme de violentes averses… Or une pluie trop forte n’apporte aucun bénéfice aux cultures. Pire, elle provoque des dommages souvent considérables (lessivage et érosion des sols pour ne parler que de ceux-là), qui compromettent à leur tour le résultat des futures récoltes.
La multiplication des phénomènes climatiques extrêmes
Canicule et sécheresse, vagues de froid, pluies torrentielles, vents violents, inondations et glissements de terrain, incendies forestiers, orages de grêles… L’énumération pourrait faire penser à un mauvais film-catastrophe.
Pourtant, ces évènements n’ont désormais plus rien de virtuel.
De plus en plus souvent à la une des journaux, ils sont l’un des signaux majeurs du changement climatique.
Leur survenance tend à s’accélérer depuis quelques années, en Europe comme ailleurs. Ici et là, des dizaines d’hectares de cultures se trouvent régulièrement anéantis par ces catastrophes. Et si rien n’est fait, le phénomène risque même d’hypothéquer la sécurité alimentaire au niveau mondial. Cultures fourragères ou vivrières, fruits ou cultures maraîchères, aucun secteur ne devrait être épargné, pas même celui de l’élevage, très dépendant des fourrages verts.
L’essor des maladies cryptogamiques et la prolifération des parasites, autres conséquences du changement climatique
On l’a déjà évoqué : la hausse des températures à l’échelle mondiale provoque une augmentation des périodes de sécheresse. Malheureusement, ce n’est pas son seul défaut, car elle engendre aussi une modification des écosystèmes. Les conséquences néfastes qui découlent de ces changements sont légion. On constate par exemple une augmentation de la présence de ravageurs sur la plupart des cultures. Facteur aggravant, certains parasites se développent désormais là où leur présence n’avait jusqu’à présent jamais été détectée.
En favorisant la présence d’insectes nuisibles, le dérèglement climatique agit aussi comme un catalyseur de maladies pour la végétation. Affaiblies par le manque d’eau ou de nutriments, les plantes deviennent plus vulnérables aux attaques de nuisibles.
Punaises, cicadelles, cécidomyies, charançons : chaque année, ces ravageurs occasionnent un peu plus de dégâts aux cultures, par consommation directe ou plus encore parce qu’ils sont vecteurs de viroses.
Trois exemples concrets des effets du changement climatique ci-après.
- La généralisation des cas de rouille brune
Les épisodes de gel trop rares associés à un fort taux d’humidité favorisent le développement de maladies cryptogamiques. C’est notamment le cas de la rouille brune, véritable fléau pour la culture du blé.
- Les invasions de limaces
Un hiver doux et une forte pluviosité créent des conditions idéales pour la prolifération des limaces… Et on sait à quel point ces gastéropodes sont friands de jeunes plants. Pour les producteurs de colza, la présence de limaces est donc bien souvent annonciatrice d’une chute brutale de la production.
- La multiplication des pucerons
Grands bénéficiaires de la hausse des températures moyennes, les pucerons pullulent chaque année un peu plus. Problème, ces insectes sont vecteurs de nombreuses maladies (parmi lesquelles la JNO ou jaunisse nanisante de l’orge). À noter, ils peuvent aussi provoquer de gros dégâts sur le tournesol et les plantes protéagineuses (pois, lupin, luzerne, lentilles…).
D’une manière générale, maladies et parasites compromettent la qualité des récoltes et réduisent les rendements. Si les conséquences peuvent être délétères sous nos latitudes, elles le sont encore plus dans les pays ne disposant pas de moyens pour lutter contre ces fléaux. C’est ainsi que la prolifération de ravageurs compromet chaque jour davantage la sécurité alimentaire de certains pays en voie de développement… Un vrai désastre en perspective.
Changement climatique : quelles solutions pour l’agriculture ?
C’est vrai, la liste des menaces liées au dérèglement climatique n’incite guère à l’optimisme.
Pourtant des solutions pour tenter d’endiguer le phénomène existent.
Quelques pistes à suivre pour mieux résister aux crises à venir…
Favoriser la transition vers l’agroécologie
Aussi soucieuse de préserver les ressources naturelles que le bilan financier des exploitants agricoles, l’agroécologie est sans doute l’une des meilleures réponses au défi du changement climatique. Mais dans quelle mesure cette approche « novatrice » peut-elle ouvrir la voie vers une agriculture plus résiliente ? Des exemples d’actions concrètes dans les lignes à suivre.
Encourager une biodiversité fonctionnelle au sein des exploitations
Favoriser la biodiversité, cela commence par la création d’espaces semi-naturels (haies, prairies de fleurs sauvages, arbres isolés…) autour des terrains cultivés, pour que les insectes y trouvent des conditions d’habitat favorables.
En parallèle, cela passe aussi par un respect plus strict des règles d’application des produits phytosanitaires et des insecticides…
Ce n’est que par le biais de ces actions conjuguées qu’on peut espérer une diversification des insectes auxiliaires, précieux facteurs de régulation naturelle des ravageurs.
Diversifier les cultures et opter pour des végétaux résilients
Parce qu’elle permet d’améliorer la structure du sol et d’optimiser l’utilisation des nutriments, la rotation des cultures réduit sensiblement les risques de maladie. C’est donc un moyen tangible de résister aux aléas du climat.
Mais il faudra sans doute aller plus loin dans la remise en question de nos modèles agricoles pour espérer contrer la menace.
Les études récentes confirment toutes la hausse globale des températures à l’échelle mondiale. Il nous faudra donc nous adapter à ces nouveaux paradigmes, sans doute à court terme. Parmi les changements à envisager, la nécessité de diversifier les choix de culture apparaît comme une évidence.
Compte tenu des prévisions d’augmentation des épisodes très secs, la logique voudrait qu’on s’oriente désormais vers la culture de plantes peu gourmandes en eau, telles que les pois chiches, le chanvre ou les légumineuses à graines… Connus pour leur capacité à résister aux températures extrêmes, le sorgho, le soja et le tournesol peuvent aussi faire partie des options possibles.
D’une manière générale, les cultures originaires des pays chauds, qui nécessitent une température de démarrage importante, pourront probablement être envisagées à brève échéance, même sous nos latitudes.
Réduire les émissions de gaz à effet de serre, une priorité absolue pour plus de résilience
Selon les chiffres de l’INSEE, les rejets de l’agriculture française représentaient 19 % des émissions nationales de gaz à effet de serre en 2022. Un chiffre conséquent, qui place ce secteur au deuxième rang des activités les plus émettrices de GES, juste derrière les transports.
Or on connaît l’influence de ces émissions sur le climat…
Parallèlement à la mise en place de solutions permettant d’affronter la crise climatique, la logique voudrait donc qu’on tende tout d’abord à limiter les activités agricoles les plus productrices de GES.
Pour cela, il convient d’encourager toutes les pratiques agricoles permettant de stocker le carbone dans les sols. L’agroforesterie ou l’agriculture de conservation en sont des exemples : en favorisant le stockage du carbone dans la biomasse végétale, ces pratiques contribuent à compenser une partie des émissions de GES du secteur.
Côté élevage aussi, des leviers peuvent être actionnés pour réduire les émissions de GES. La méthanisation en est un exemple probant.
Mettre en place des systèmes permettant une gestion raisonnée des ressources en eau
Le changement climatique affecte la disponibilité des ressources en eau. Or, sans une gestion efficace de cette ressource, l’agriculture n’est rien.
Dans ce domaine, les solutions tiennent en partie aux innovations technologiques.
L’installation de capteurs d’humidité et de systèmes de contrôles automatisés permet par exemple d’adapter les apports hydriques aux besoins des cultures, et ce, en temps réel.
Très efficaces pour éviter les pertes par évaporation, les systèmes d’Irrigation goutte à goutte assurent également un apport hydrique optimal aux végétaux.
Mais la gestion raisonnée des ressources en eau passe aussi par des procédés « traditionnels » connus depuis bien longtemps… Le paillage organique des sols et la collecte des eaux de pluie en sont quelques exemples.
Optimiser la fertilisation azotée des sols : une étape essentielle pour une agriculture durable
Mal maîtrisée, la fertilisation azotée entraîne des rejets de nitrates et d’ammoniac dans les sols, les cours d’eau et les nappes phréatiques. Elle est aussi en partie responsable de la formation de G.E.S.
Favoriser une utilisation raisonnée de l’azote devient donc une action prioritaire pour, à terme, mieux résister au changement climatique. Pour y parvenir, plusieurs approches sont possibles :
- L’ajustement des doses et le fractionnement des applications pour répondre précisément aux besoins des cultures en fonction de leur stade de développement. Le principe est on ne peut plus simple, puisqu’il consiste à répartir les applications d’engrais par petites doses, mais, tout au long du cycle de croissance des cultures. L’avantage est double : les besoins des plantes sont mieux couverts et les risques de perte d’azote dans l’environnement sensiblement réduits.
- Le recours à des formes d’engrais susceptibles de réduire les pertes par volatilisation tels que les engrais à libération contrôlée ou encore les effluents d’élevage.
- La généralisation des cultures intermédiaires qui permettent de limiter les pertes d’azote par lixiviation.
- Le recours aux cultures de couverture, c’est-à-dire à des plantes semées entre les cultures principales pour absorber les éventuels excès d’azote.
- L’option « légumineuses » : naturellement riches en azote, ces plantes améliorent la fertilité des sols tout en réduisant la dépendance aux engrais. Utilisées dans le cadre d’un système agricole diversifié, elles peuvent elles aussi contribuer à favoriser un usage plus raisonné des fertilisants.
Optimiser la fertilisation azotée, c’est donc trouver le moyen d’apporter à la plante ce dont elle a besoin, au bon moment, tout en tenant compte des reliquats du sol. Il y va de la rentabilité des exploitations comme du bilan environnemental du secteur agricole. C’est dire si l’enjeu est de taille !
Vraie source d’inquiétude pour l’humanité toute entière, le changement climatique se présente comme un défi majeur pour le monde agricole. Pour tenter d’en limiter les effets délétères, il semble urgent d’agir.
Bonne nouvelle : des solutions existent, parmi lesquelles l’adoption de pratiques plus durables, la réduction des émissions de gaz à effet de serre et la diversification des cultures… Des actions aussi indispensables pour garantir la sécurité alimentaire que pour assurer l’avenir et la pérennité des exploitations agricoles sur notre territoire.
Besoin de conseils pour la gestion des apports en engrais ? Les experts SNEB sont là pour vous aider.
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